lundi 29 octobre 2012

"14" : la fresque grandiose de Jean Echenoz.

Jean Echenoz est né à Orange en 1947. Il obtient le Prix Médicis en 1983 pour Cherokee et décroche le Goncourt en 1999 pour Je m'en vais.

Ils partaient pour 2 semaines. Un mois maximum.

Comme son titre l'indique, "14" est un roman sur la première guerre mondiale. Un roman ? Pas sûr, tant l'approche, l'angle, comme disent les journalistes, est d'un réalisme pétrifiant. La 4ème de couverture résume assez bien le corps épuré de l'ouvrage :"Cinq hommes sont partis à la guerre, une femme attend le retour de deux d'entre eux. Reste à savoir s'ils vont revenir. Quand. Et dans quel état". Fermez le ban, si j'ose dire ! Ils partaient pour quelques semaines seulement, la fleur au fusil... On connait la suite.

Au moment où le gouvernement projette de confondre la commémoration du centenaire de "la Grande Guerre" (en 2014), et celle de la seconde guerre mondiale (le 6 juin 1944 n'est pas le 8 mai 1945, ou me trompé-je !?), le tout dans un embrouillamini où personne ne s'y retrouvera, la seule lecture de ce petit livre (par sa taille) de 120 pages, mais tellement grand par sa force, devrait suffire à honorer nos Poilus dans le respect qu'ils méritent. (Je reviendrai avant le 11 novembre sur ce sujet dans mon blog politique).

"14" est d'abord une fresque sociale. 

En effet, les 5 jeunes gens du même village, qui partent faire la même guerre dans le même régiment, ne seront pas traités de la même façon... Sur fond d'histoire d'amour, Blanche attend le retour de 2 de ces jeunes hommes : celui qu'on lui a choisi pour mari et celui qu'elle aime. 

"14" est ensuite un album photos. 

A l'image d'un Pierre Schoendoerffer, Echenoz est embarqué avec ses "héros" sur le terrain, et partage leurs peurs, leurs espoirs, leur vie de malheur. Tout comme les photos du célèbre réalisateur, les images qu'Echenoz nous propose sont ciselées d'adverbes et d'adjectifs précis, construites de phrases courtes. Il nous peint une atmosphère lourde dont l'issue laisse peu de doute, autant pour les combattants que pour ceux "de l'arrière". 

"14"est enfin un rappel de ce qu'est la guerre.

Page 88:" ...le vin n'étant plus un problème car à présent largement distribué par l'intendance avec l'eau-de-vie, dans l'idée de plus en plus cultivée par l'état-major selon laquelle enivrer le soldat concourt à amplifier son courage et, surtout, diminue la conscience de sa condition...".

14, de Jean Echenoz aux éditions de Minuit. Septembre 2012. 12,50euros.



  






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